24 novembre 2022
Axe 2 | Le défi de la construction de la paix.
Comment mettre en place une paix durable ?
Jalon : Les traités de Westphalie : le premier congrès de paix européen.
25 novembre 2022
Portrait d'Anne-Geneviève de Bourbon-Condé, duchesse de Longueville (1619-1679), en déesse de la Paix et de la Concorde. Son mari était l'un des plénipotentiaires français au congrès de Münster. Victor Cousin (1792-1867), dans sa biographie de la duchesse, écrit : «Pendant tout l'automne de 1646 et l'hiver de 1647, elle fut comme la reine du congrès de Münster. Ses grâces touchèrent les diplomates aussi bien que les guerriers. L'ambassade française était riche en hommes supérieurs: sous M. de Longueville étaient les comtes d'Avaux et Servien, la fleur de notre diplomatie.»
L'académicien Voiture, dans une lettre au comte d'Avaux, faisait un éloge paradoxal de Mme de Longueville : «croyez-vous que l'on puisse trouver, je ne dis pas dans une seule personne, mais dans tout ce qu'il y a de beau et d'aimable répandu par le monde, croyez-vous que l'on puisse trouver tant d'esprit, de grâces et de charmes qu'il y a dans cette princesse?... Soyez sur vos gardes. Elle écrit ici des merveilles de vous et de l'amitié qui est entre vous. Le commerce est dangereux avec elle». Mme de Longueville fut en effet une intrigante – autrement dit une politique habile – et l'une des plus redoutables instigatrices de la Fronde, la révolte nobiliaire et bourgeoise qui mit en difficulté Mazarin entre 1648 et 1652.
En divertissant le Congrès par sa beauté et par son esprit, Madame de Longueville servait la diplomatie française, comme le soulignait d'Avaux dans sa réponse à Voiture: «Une personne si précieuse, qui est venue de deux cents lieues chercher un vieux mari, qui a quitté la cour pour la Westphalie, qui est ici dans une gaieté continuelle, [...] qui donne force audiences [...] qui ne s'effraye plus d'un gros Hollandois qui la baise [il s'agit du baise-main] réglément deux fois par heure en toutes les visites qu'il lui fait, qui reçoit agréablement la civilité d'un autre ambassadeur qui lui conseille d'apprendre l'allemand pour se divertir, qui avec tout cela prend de l'embonpoint à Münster et a un visage de satisfaction, qui partage ses heures entre les belles lectures et les audiences, qui avance la paix autant par ses conseils que par ses prières, qui n'a pas seulement en un haut degré les vertus des femmes, mais qui en a beaucoup d'autres.»
➣ Lire: sur le site du Quai d'Orsay, le ministère des Affaires étrangères, le portrait d'un grand diplomate, artisan des traités de Westphalie. Abel Servien : un négociateur opiniâtre et pragmatique à Münster (1644-1648).
L'Europe à la signature des traités de Westphalie (1648), carte tirée de l'atlas historique allemand Westermann. Les traités, négociés en Westphalie à Münster et Osnabrück à partir de 1644, sont l'aboutissement du premier congrès européen. Il s'agit d'une paix négociée, entre États qui assument leurs divergences, mais veulent mettre un terme à une guerre éprouvante, la Guerre de Trente Ans. Les États européens se reconnaissent mutuellement : malgré les différences religieuses, ils ont en commun le régime monarchique et l'idée que le pouvoir politique prime. D'où le règlement suivant :
- Le principe cujus regio, hujus religio, autrement dit les princes peuvent imposer leur religion à leurs sujets.
- L'organisation complexe, voire anarchique, du Saint-Empire fut maintenue, de telle sorte que les pouvoirs de l'Empereur, issu de la famille des Habsbourg, étaient fortement réduits : cela favorisait la France et la Suède, ainsi que les princes électeurs de l'Empire.
- La France a imposé sa langue comme langue diplomatique à la place du latin, ce qu'elle a pu faire parce qu'elle était la plus grande puissance européenne. Elle a également obtenu des territoires : les évêchés lorrains de Metz, Toul et Verdun, qu'elle tenait déjà de fait (pas encore de droit), et l'Alsace moins Strasbourg (l'Alsace et Strasbourg furent «réunies» au royaume par Louis XIV en 1681).
Deux lectures des traités de Westphalie sont possibles selon les perspectives nationales:
- Du côté français, on a insisté sur le début de la prépondérance française en Europe, qui allait durer jusqu'à la chute de Napoléon et au Congrès de Vienne en 1814-1815.
- Du côté allemand et dans la perspective européenne d'aujourd'hui – celle de l'Union européenne – on met en valeur l'organisation de l'Europe par la négociation et le compromis.
La paix de Westphalie a-t-elle débouché sur un système stable ? Là encore, la réponse est nuancée :
- D'un côté, la culture diplomatique a modéré les conflits entre États européens, ce qui débouche sur le «concert européen» des XVIIIe et XIXe siècles. L'Europe devient une sorte de «grande république», c'est-à-dire une communauté, partageant des valeurs communes, que Voltaire (1694-1778) a décrite dans Le siècle de Louis XIV (1751) [lecture audio, 1'23"].
- Mais cela n'a pas empêché de multiples guerres, comme la guerre de Succession d'Autriche et la guerre de Sept Ans dont nous avons déjà parlé.
Documents distribués en classe :
➣ Les traités de Westphalie vus par le manuel scolaire Malet & Isaac des années 1950 : page 1 et page 2.
➣ La paix westphalienne vue par l'historienne Claire Gantet dans son manuel sur le Saint-Empire (2018). Le Malet & Isaac insiste sur la prépondérance française et présente les traités de Westphalie comme un «chef d'œuvre de la diplomatie», Claire Gantet insiste sur la dimension européenne et sur les limites de cette paix.
La paix westphalienne : objectifs, méthode et résultats.
28 novembre 2022
Jalon : Kofi Annan, un artisan de la paix à la tête de l'ONU 1997-2006.
➣ Revoir: sur le site du journal Le Monde, «Kofi Annan, une vie au service de la paix», video publiée en 2018, au moment de la mort de l'ancien secrétaire général de l'ONU [env. 5'].
➣ et dans la série Les Grands Discours d'Arte, «Dominique de Villepin : non à la guerre en Irak» [10'45"].